Sur la peinture en plein-air

Un peintre néo-classique, Pierre-Henri de Valenciennes (1750-1819), avait publié en 1800 des réflexions et des conseils sur l'art du paysage, qui vont devenir la bible des peintres de plein-air tout au long du 19e siècle. En voici quelques extraits :

— La difficulté à copier la nature :
1. « quand cet objet est illuminé par le soleil, et que la lumière et les ombres changent continuellement à cause du mouvement de la terre, on ne peut prendre son temps pour copier la nature ; les effets choisis de lumière changent si rapidement qu'on ne reconnaît plus les effets avec lesquels on a commencé.

2. «.... ce que nous avons dit devrait suffire à faire comprendre qu'il est absurde pour un artiste de passer un jour entier à copier une seule vue de la nature.»

— L'impossibilité de reprendre son travail le lendemain :
3. «.... les effets de la nature ne sont jamais les mêmes au même instant ou à la même heure du jour. Ces variations dépendent d'un grand nombre de facteurs, comme la pureté de la lumière, la quantité de vapeur dans l'atmosphère, le vent, la pluie, la hauteur d'élévation du site et les différentes réfractions des nuages, causées par leur couleur, leur lourdeur ou leur légèreté.

— La solution au problème :
4. «.... L'élève qui veut peindre d'après nature doit dès lors prendre un autre chemin, ou son travail sera vain. D'abord, il doit se restreindre à copier, du mieux possible, les tons généraux de la nature dans l'effet qu'il a choisi . Commencez votre étude par le ciel, qui donne le ton à l'arrière-plan; celui-ci, à son tour, donne le ton à ceux des plans avec lesquels il se connecte. De cette façon, avancez graduellement vers l'avant-plan, qui, en conséquence, est toujours en harmonie avec le ton du ciel utilisé pour établir le ton local. Vraiment, avec cette méthode, rien ne peut être traité en détail.

5. En réalité, toutes les études devraient être faites tout au plus en deux heures; si l'effet étudié est celui du lever ou du coucher de soleil, on ne devrait pas y passer plus d'une heure.

— Une remarque annonciatrice
6. C'est une bonne chose de peindre la même vue à différentes heures du jour, de manière à pouvoir observer comment la lumière altère les formes. Ces changements sont si clairement perceptibles et si étonnants que les objets sont à peine reconnaissables.»

Ce qui sera retenu par les Impressionnistes :
1. l'exécution rapide
2. le temps de travail limité sur un motif pour capter dans leur généralité les effets de soleil, de brume, de pluie, etc.
3. Monet : la reprise d'un même motif à des heures différentes, ds des climats différents.

Extraits traduits de : P. H. De Valenciennes, «Advice to a student on Painting, and particularly on landscape», 1800, in C. Harrison et alii. Art in Theory, 1648-1815. London, Blackwell Publishing, 2000, pp. 1053-1055.